Commentaire de gestion - Mars 2023

 Après une année 2022 marquée par un resserrement monétaire sans précédent de la part des banques centrales et ses lourdes conséquences sur les places financières mondiales, les investisseurs ont profité d’un début d’année en fanfare, notamment en Europe où les principaux indices affichent au 1er trimestre des hausses supérieures à 10% (Eurostoxx 50 +13,74% ; CAC 40 +13,12%), tirées principalement par l’envolée des valeurs du luxe et le réveil des valeurs cycliques qui avaient été sévèrement sanctionnées l’année dernière.

La baisse plus prononcée que prévu de l’inflation américaine en décembre (9,2% vs 9,5% estimée) et les espoirs d’une reprise de la croissance en Chine expliquent très largement le retour de l’optimisme sur les marchés européens dopés par ailleurs par la forte baisse des prix de l’énergie et la bonne résistance des économies du Vieux Continent. Une situation qui contraste fortement avec la performance modeste des marchés américains sur la période (S&P 500 +7%), même si les valeurs technologiques US amorcent un redressement remarquable (Nasdaq +20%) après une année 2022 il est vrai particulièrement difficile (-32%).

Focalisés sur la persistance d’une inflation toujours élevée Outre Atlantique et l’impact des hausses de taux sur l’économie (encore mesuré à ce stade), les investisseurs américains continuent à manifester une certaine prudence face à un risque de récession qu’ils jugent toujours bien réel, voire quasi-certain si l’on se réfère à l’expérience des périodes de resserrement monétaire observées aux Etats-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

La faillite de la banque régionale californienne SVB à la mi-mars a sans doute aussi contribué à renforcer les craintes des gérants de Wall Street à nouveau confrontés au spectre d’une crise interbancaire heureusement vite circonscrite grâce à la réactivité de la Fed et aux mesures mises en place. Elle met toutefois en évidence les dangers que représentent les hausses de taux agressives des banques centrales pour le système bancaire. La résilience des données économiques combinée à la menace d’instabilité du secteur financier laisse les banques centrales dans une position inconfortable, même si la situation des grands établissements bancaires n’est en rien comparable à celle qui avait été observée lors de la crise interbancaire de 2008. A cet égard, les difficultés du Crédit Suisse, anciennes et spécifiques à cet établissement, doivent être relativisées : les principaux établissements bancaires européens bénéficient aujourd’hui de bilans solides et d’une forte capacité bénéficiaire !

Dans ce contexte économique incertain mais au final meilleur que ce que l’on pouvait craindre à priori, les chiffres de l’inflation « core » (c’est-à-dire retraitée des fluctuations des matières premières agricoles ou énergétiques) continueront à guider les décisions des banques centrales au cours des prochains mois. Selon une majorité d’économistes, les prémices d’un recul de l’inflation observées sur la période récente permettent d’espérer un ralentissement du resserrement monétaire en cours de part et d’autre de l’Atlantique. Une inflexion qui, si elle se concrétise, serait favorable aux marchés actions et en particulier aux marchés actions européens, moins exposés au risque d’une récession que les marchés américains. 

Par Philippe de Cholet