Après avoir battu des records à la hausse tout au long de l’année 2021, les Bourses mondiales se sont enfoncées dans le rouge au cours du premier semestre, sévèrement affectées par une inflation galopante, l’envolée des taux d’intérêt et les nombreuses fragilités qui minent aujourd’hui l’économie mondiale, de la guerre en Ukraine et ses conséquences sur les prix de l’énergie à la politique « zéro-Covid » en Chine et son impact délétère sur les chaînes d’approvisionnement. Dans ce contexte particulièrement sombre, les marchés européens ont enregistré leur pire semestre depuis 2008 (CAC 40 en baisse d’un peu plus de 15%) tandis que les actions américaines, avec une baisse d’environ 20% sur l’indice S&P 500, subissent la chute la plus importante depuis plus de 50 ans.
L’explosion du prix des matières premières explique en grande partie l’inflation très élevée qui frappe aujourd’hui l’économie mondiale. Qu’il s’agisse de l’énergie, des denrées alimentaires ou des métaux, la flambée des matières premières est historique et généralisée. La guerre en Ukraine a considérablement renforcé les tensions liées à la reprise post-Covid déjà à l’œuvre depuis 2021. Un phénomène inquiétant car le poids des ressources naturelles est loin d’être négligeable pour l’économie mondiale. Selon le FMI, la facture globale des matières premières en 2022 devrait s’alourdir de près de 5.200 milliards de dollars par rapport à 2019, soit l’équivalent d’environ 5% du PIB mondial !
Face à cette menace, les banques centrales ont été amenées à changer brutalement de politique monétaire. Délaissant leur soutien sans faille à l’économie, elles sont aujourd’hui engagées dans une lutte contre l’inflation désormais considérée comme l’objectif prioritaire. Outre-Atlantique, la Réserve Fédérale a accéléré l’extinction de son programme d’achats d’actifs (« quantitative easing »), tout en remontant ses taux directeurs à un rythme inédit depuis près de 30 ans (ils s’établissement aujourd’hui entre 1,5% et 1,75% contre une fourchette de 0% à 0,5% début mars). De son côté, la Banque Centrale Européenne s’apprête à suivre les pas de la Réserve Fédérale en ayant annoncé son intention d’augmenter ses taux directeurs fin juillet, la première en 11 ans.
Dans ce contexte, le risque d’une récession de l’économie américaine au cours des prochains mois - et ses conséquences sur l’économie mondiale - n’est plus à exclure, même si la question est aujourd’hui largement débattue chez les économistes. Si la dégradation des indicateurs d’activité semble annoncer un ralentissement marqué de la croissance, la bonne résistance du secteur des services pourrait en revanche en limiter l’ampleur du fait de son poids dans l’économie américaine. La poursuite du rattrapage de l’activité post-pandémie et la bonne tenue de la consommation des ménages (70% du PIB américain) devraient par ailleurs contribuer à éviter une récession forte et durable. Le scénario du pire aux Etats-Unis est donc loin d’être certain !
Last but not least, l’amélioration de la situation économique en Chine pourrait commencer à faire sentir ses effets positifs sur l’économie mondiale. La levée graduelle des restrictions de la politique « zéro-Covid » et les politiques de relance opérées par le gouvernement et la Banque centrale ont en effet montré une légère amélioration des données d’activité sur la période récente, même si celles-ci restent encore à des niveaux assez bas. Un vent d’optimisme prudent venue d’Asie qui offre sans doute une bonne opportunité pour se repositionner sur les actions chinoises, fortement délaissées depuis deux ans.
Par Philippe de Cholet